Cette page, c’est l’occasion d’en savoir plus sur le travail que Latitudes Prod. mène depuis 2008. La team Latitudes Prod. vous a préparé de nombreux contenus pour en savoir plus sur notre travail. Entre interviews, vlog, statistiques et ressources extérieures, vous saurez tout sur Latitudes Prod. et sur le fonctionnement des bureaux de production.

Un bureau de production, en quoi ça consiste ?

Dans les années 2000, des professionnel·les de la culture se sont rendu·es compte de la nécessité des artistes à avoir de l’aide pour des compétences professionnelles qu’iels n’ont pas. Ainsi, des bureaux de production se sont développés dans toute la France avec les mêmes objectifs, mais différentes façons de travailler.

Un bureau de production accompagne les artistes à 360° : production, diffusion, administration, communication :

PRODUCTION
Selon le CN D, le Centre National de la Danse, la production « consiste à organiser les moyens financiers, techniques, logistiques, humains et artistiques en vue de la création d’un nouveau spectacle ».

DIFFUSION
Le fait d’exploiter un spectacle, de faire des représentations de ce spectacle devant un public. Une personne chargée de la diffusion va contacter des structures qui pourront accueillir le spectacle, contre le prix de cession.

ADMINISTRATION
Il s’agit de l’ensemble de la gestion fiscale, juridique et sociale d’une compagnie, de ses activités et de ses créations.

COMMUNICATION
Assurer la visibilité de l’artiste à travers différents moyens : newsletters, réseaux sociaux, site internet, etc.

Avant de continuer, petit tour d’horizons des membres de Latitudes Prod. :

Maria-Carmela Mini, directrice de Latitudes Contemporaines nous parle de Latitudes Prod. et des bureaux de production

Paul Garcia, chargé de production et de diffusion nous en apprend plus sur son métier

« En tant que chargé de production, je suis là pour faire attention à mon artiste, à son bien-être physique, affectif et moral. Ça peut se rapprocher de l’animation car il y a des mécaniques communes. Je dis peut-être ça parce que j’ai une formation dans l’animation. Par exemple pour Consolate, ses œuvres sont très en lien avec sa personne, elle aborde des sujets qui la traversent directement. Dans le cadre de son projet Un Retour, elle a parlé avec une agence de voyage burundaise. Le courant est bien passé avec la personne qui la reçoit, cette personne travaille depuis longtemps dans cette agence. Alors, elle se rend compte que cette personne était là quand Consolate a été trafiquée illégalement. Parfois, quand elle apprend des nouveaux éléments sur son passé, c’est vraiment dur pour elle. Elle arrive à prendre du recul mais là elle va retourner au Burundi, elle m’a dit que je ne pourrai pas compter sur elle pour répondre correctement aux mails, pour suivre tout ce qui se passe artistiquement parlant car tout va s’accélérer, ça va lui faire peur, etc. Il y a vraiment un aspect « prendre soin » que je trouve très intéressant dans ce métier, et qui doit être bien fait.

Comme je suis artiste à côté, je peux me mettre à leur place sur plein de potentielles bêtises que les artistes pourraient faire car il y a des bêtises que moi je fais. Donc je peux projeter un peu plus de sécurité, prévoir les éventuels couacs. Je dois faire tampon entre tout le monde. Par exemple, si les gens sont déçus par le travail d’un·e artiste, parce qu’il n’est pas au niveau ou pas assez exigeant à certains endroits, c’est moi qui dois en parler à l’artiste. Il faut ajuster ce qu’on dit et faire attention à la façon dont cela est reçu, car les œuvres sont souvent des mises en scène sensibles et personnelles alors un retour négatif peut être blessant personnellement.

Être chargé de production c’est aussi prendre des billets de train, ce n’est pas la partie que je préfère mais c’est vrai qu’il y a cette dimension logistique à prendre en considération.

Être artiste ça m’a donné toutes les bases de réflexion je pense. Ce n’est pas tant dans les solutions, c’est ce qu’il me manque le plus, c’est-à-dire les bases légales, etc. C’est plutôt la réflexion autour d’un montage de projet, la logique d’un projet. Comme je suis sorti des Beaux-Arts, je peux me rendre compte que ça va être trop long, qu’il va y avoir des soucis d’organisation, … Par exemple, si on fait une résidence à 12 personnes pendant 5 jours c’est formidable mais ça veut dire que tout le monde ne peut pas travailler en même temps, donc on gaspille de l’argent à payer des gens à rien faire, et d’un autre côté le projet va être bancal à la fin parce qu’on n’a pas eu le temps, on n’a pas fait un bon planning de résidence.  Ça m’est déjà arrivé donc je peux changer ça pour pas que ça se passe comme ça pour mon artiste. »

Paul nous livre une anecdote insolite qu’il a vécue en tant que chargé de production :

« Une artiste pakistanaise était réfugiée en Italie. Avec Latitudes Contemporaines, on organisait des workshops avec des artistes réfugié·es dans le cadre d’INFRA. Il y avait l’enjeu de faire venir cette artiste en Moldavie avec un passeport pakistanais mais réfugiée en Italie. Est venue la question de savoir : est-ce qu’elle a besoin d’un visa pour venir travailler deux semaines en Moldavie ? Personne ne savait. Dans cette situation, c’était très compliqué : on a cherché dans tous les sens. L’agence de voyage ne nous a pas aidé·es, elle nous demandait des assurances… Il y a eu un micmac juridique qui a duré presque 15 jours. L’artiste était vraiment motivée, elle n’a pas abandonné. Le jour du départ, elle est venue avec ses affaires sans savoir si elle allait pouvoir partir. Ce même jour, elle a reçu un mail qui disait que ce n’était pas possible sans son visa. Finalement, elle a perdu 3 jours de workshop sur 15 jours, mais elle a réussi. Tout ça pour qu’elle se rende compte qu’elle n’avait pas besoin d’un visa. Elle a dépensé des heures pour faire un visa alors qu’elle avait les mêmes droits que les ressortissant·es européen·nes. Dans notre métier, on peut être face à des situations inattendues. »

Adèle Devos, chargée d’administration pour Latitudes Prod.

« Un bureau de production est une structure qui a pour but d’accompagner les artistes dans le développement de leurs projets artistiques. Pour cela, plusieurs personnes travaillent par grands pôles de compétences pour mener à bien la mise en place du projet : la recherche de financements, la production, la logistique, l’administration, la diffusion et la communication.

Selon moi, l’enjeu du bureau de production, n’est pas uniquement d’accompagner l’artiste dans ses projets artistiques, mais également d’aider l’artiste à se structurer professionnellement dans sa carrière et de contribuer à son développement. De plus, à Latitudes Prod., nous fonctionnons en production déléguée. C’est-à-dire que pour qu’un·e artiste puisse se structurer correctement, nous proposons de créer sa compagnie par le biais d’une association. Et c’est à travers sa compagnie qu’iel pourra développer ses projets artistiques. Comme ça, iel est totalement indépendant·e et autonome : si un jour iel veut quitter le bureau de production, iel repart avec son petit sac à dos dans lequel il y aura sa compagnie qui lui appartient et tous ses projets artistiques. C’est plus simple pour nous de fonctionner avec des compagnies et c’est valorisant pour l’artiste.

L’administration est un peu un monde à part dans le milieu de la culture, souvent ça fait un peu peur quand j’aborde mes missions. Déjà, il est important de préciser que dans mon poste, j’aborde deux formes d’administration :

Il y a d’abord l’administration générale liée à la vie quotidienne de la compagnie et de son activité en tant qu’association-même : gestion de la trésorerie globale de la compagnie, facturation, gestion des salaires, organisations des assemblées générales, rédaction des bilans d’activités, rédaction de contrats de cessions, gestion des relations avec les prestataires des compagnies (banque, prestataires de paie et comptable). Et de manière générale, gérer et suivre les diverses affiliations sociales, fiscales et administratives des compagnies et veiller à ce que chaque compagnie soit à jour de ses cotisations et obligations déclaratives.

De l’autre côté, pour développer des projets artistiques, on a aussi besoin d’administration. C’est ce que l’on appelle l’administration de production. Elle est là pour évaluer la faisabilité du projet d’un point de vue financier, matériel et humain : budgétisation, recherche de financement, rédaction de divers contrats, gestion salariale et embauches des équipes artistiques et technique mobilisées sur le projet, etc. Ce sont des missions réalisées en étroite collaboration avec les chargé·es de production et de diffusion du bureau. Il y a aussi tout l’aspect qui est relié aux droits d’auteurs et de la propriété intellectuelle de la pièce qui n’est pas à négliger. En effet, quand un·e artiste crée une pièce, et qu’iel veut utiliser une image ou une musique qui ne lui appartient pas, il faut s’assurer d’avoir les autorisations et de connaître les modalités auprès de la personne qui détient les droits. Il y aussi tout ce qui concerne le dépôt des œuvres auprès des organismes comme la SACD ou la SACEM.

Donc en réalité, l’administration est assez structurée et certaines missions reviennent plus que d’autres, mais je n’ai pas vraiment de quotidien type. En résumé, l’administration dans le spectacle vivant, c’est la gestion fiscale, financière, sociale et juridique d’une compagnie et ses projets.

Avant j’étais chargée de production et dans le cadre de mes fonctions, il y a des choses que je n’arrivais pas à saisir dans le développement des projets et je me retrouvais souvent face à des blocages liés à l’administration. Plein d’aspects étaient totalement flous pour moi et ce qui m’a donné envie de faire de l’administration. Faire de la production et de l’administration permet de comprendre la gestion d’un projet artistique et ses enjeux dans son ensemble, d’un point de vue technique mais aussi humain.

Ainsi selon moi, la production et l’administration sont totalement liées : sans administration il ne peut y avoir de production et vice-versa. Répondre aux obligations sociales, juridiques et financières sont un réel pivot dans la mise en place d’une production et contribue à la création du projet. Et c’est pour cela que j’aime travailler pour Latitudes Prod. : c’est un vrai travail d’équipe. En effet, je suis en communication constante avec les chargé·es de production et nos missions se complètent.

L’administration expose un point de vue global sur un écosystème, c’est ce qui me plaît, même si parfois le terrain manque un peu. Ça peut sembler être un métier un peu ingrat parce qu’on est un métier de « l’ombre » et on peut se sentir un peu éloigné des artistes. Cependant, les artistes du bureau de production sont toujours très reconnaissant·es du travail de l’administration et c’est gratifiant. Quand je me rends sur une première d’un spectacle sur lequel nous avons travaillé, j’aime le fait de me dire que mes missions sont réalisées en coulisses et que celles-ci ne sont pas forcément conscientisées par les équipes et le public, mais que sans l’administration, le projet n’aurait pas pu avoir lieu et que les équipes n’auraient pas pu être sur scène aujourd’hui. C’est toujours émouvant et gratifiant de voir la première d’un spectacle. »

Point de vue d’artiste : Solen Athanassopoulos nous raconte son expérience

« Ce n’est pas facile de se lancer, ça peut provoquer de la peur : de ne pas se sentir légitime, de ne pas être initié, de bousculer un peu les règles… Toutes ces peurs-là sont plus difficiles à gérer que l’application en elle-même. Quand je suis dans l’action, je fais ce qu’il faut faire ça se passe bien, je n’ai pas besoin de réfléchir. La réflexion peut freiner du fait de différents facteurs très concrets de la société, des proches, des professionnel·les. Mais quand nous passons ce cap, finalement nous sommes tous·tes humain·es et nous n’avons pas de différences, même dans la créativité. Je pense que tout le monde a une partie créative en soi mais la peur de prendre le risque peut freiner la création.

Il est possible de craindre le manque de légitimité, de devoir être accompagné alors que parfois on a déjà tout en soi. Je sentais que même si j’étais jeune, j’avais déjà tout, ce qu’il me manquait c’était le courage d’oser et après quand j’ai osé c’était le début de l’action. Comme je l’ai évoqué précédemment, quand je suis dans l’action, c’est plus simple. Avant c’était compliqué : il fallait affronter les étapes, se débarrasser de tout et se dire « je suis à zéro et je dois tout construire ». Il faut tout porter par soi-même y compris soi-même.

J’ai d’abord créé ma compagnie puis j’ai été interprète. Quand une personne crée une compagnie, elle va chercher à déléguer certaines tâches parce que c’est un travail monstre de gérer une compagnie. On utilise le terme chorégraphe mais c’est un peu réducteur dans ce cas-là parce qu’en fait on a différentes casquettes : chorégraphe, manager, chargé·e de production, de diffusion, d’administration, de communication. Et j’ai eu la chance d’avoir la perspective de me dire « il faut que je sois aidée » car je savais que c’était possible d’être accompagnée. Puis, de fil en aiguille, avec l’interprétariat pour Pol Pi, j’ai rencontré Latitudes Contemporaines et grâce à cela j’ai eu cette proposition de Maria-Carmela Mini. L’accompagnement s’est fait petit à petit, en répondant à des interrogations : « comment est-ce que je veux être accompagnée ? », ce n’est pas simple à mettre en place. D’ailleurs, Maria-Carmela dit souvent que la relation chargé·e de production – artiste est complexe. Il faut trouver le bon équilibre et la place de chacun·e. Et puis, il y a des modèles d’accompagnement dans le secteur culturel qui sont très différents. Je pense que ça fonctionne quand il y a un vrai équilibre entre tous les paramètres et que chacun·e connaît son rôle et est capable de l’appliquer dans la cohésion.

J’ai besoin d’appliquer ma vision à ce que doit ressembler ma compagnie, ma communication, ma connexion avec les partenaires, etc. J’ai une vision très précise mais il faut savoir trouver l’équilibre et répondre à la question « comment la personne chargée de production peut m’accompagner à appliquer cette vision ? ». Et comment, une fois qu’elle a compris ce dont j’ai envie, lui laisser toute la liberté dont elle a besoin pour s’exprimer en tant que chargée de production.

Créer un spectacle c’est un long processus : d’abord je dois admettre la possibilité de pouvoir créer un spectacle. Ensuite, je mets mes idées en ordre puis des portes s’ouvrent à moi. Pour moi, le but final ce n’est pas le spectacle en soi, c’est tout le processus de création qui permet notamment des rencontres. Ces dernières sont très significatives pour moi. D’un point de vue porteuse de projets, je dois écouter ce qui vient et ce qui m’appelle. Pour le projet KnowNess, l’idée a émergé depuis longtemps : depuis 2021, avant même d’avoir créé FormLessNess, je pensais déjà à la suite. Se projeter dans 2, 3 ou 4 ans est une problématique de la production du spectacle vivant : pour pouvoir avoir les financements, une bonne organisation et l’équipe complète à temps pour réaliser le projet. Un projet, c’est beaucoup de projections, le terme correspond à ce qu’il veut dire : il faut se projeter dans ses idées. J’essaye d’être la plus intuitive possible, c’est-à-dire laisser venir les opportunités qui sont pour moi. Et pour KnowNess, c’est quelque chose que j’essaye d’apprendre de plus en plus.

Je pense que le plus long c’est d’abord la gestation de l’idée : comment bien exprimer son idée dans tous les contours que cela signifie et visualiser ce qu’on veut dans l’ensemble, pas uniquement dans le spectacle. Ça inclut comment vont se passer les rencontres, les résidences, combien de temps ça va prendre, quelle énergie on y donne, etc. En effet, un projet c’est très personnel et représente tellement d’investissements. Il faut faire la balance concernant l’énergie consacrée à ce projet, parce qu’il y a d’autres choses à côté : la vie personnelle, la santé mentale et physique.

La mise en place du projet est simple une fois que tout est présent. Par exemple, quand j’étais en Grèce pour le projet KnowNess au début c’était compliqué : ça a mis du temps à se manifester. En 2023, une opportunité est arrivée de manière très spontanée pour laquelle on a été invité à faire une représentation même si à cet instant nous n’avions rien de concret. Donc arrivant en Grèce, je rejoins les danseur·ses que j’avais déjà auditionné et l’équipe artistique. En une semaine, malgré les contraintes, notamment le fait que toute l’équipe n’était quasiment jamais au complet, nous avons réussi et c’était très beau parce que tout était déjà anticipé dans le message mais la forme a été une surprise. Nous avions une connexion forte entre nous : même sans se parler, c’est grâce à cette connexion que nous avons atteint l’objectif, de manière naturelle.

Le processus d’imagination est compliqué parce que moi ; dans la jeunesse et dans la spontanéité, j’ai envie que les choses se manifestent tout de suite. Parfois c’est frustrant quand l’idée est claire dans ma tête et que j’ai envie que ça arrive tout de suite, que ce soit là et que je l’expérimente. Mais c’est aussi ce qui donne de la profondeur au projet : comment on le laisse maturer, commet les relations se font, comment on peut être amené à rencontrer des difficultés.

Ce qui m’intéresse c’est le process, même si je suis attachée au visuel, c’est important que ce soit de qualité et que ce soit touchant mais l’un ne va pas sans l’autre. C’est-à-dire que par exemple, il peut y avoir la meilleure lumière du monde, si elle n’a pas de sens il manquera quelque chose. »

Latitudes Prod. en 2024

Latitudes Prod. en 2023

Latitudes Prod. en 2022

▶ À visionner :

Découvrez les coulisses d’une création et rencontrez une équipe artistique de choc dans le premier vlog du bureau de prod’ : Astrid, à la communication de Latitudes Prod., vous emmène à Paris pour aller voir la première du spectacle LIVE à la Péniche Pop.


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Un autre témoignage de direction de production

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La production du spectacle vivant : un véritable accompagnement – Les Arpenteures

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